La population globale des 11 pays de la COMIFAC est estimée à 229 438 390 d’habitants en 2023 d’après les chiffres de la banque mondiale. Le taux d’accroissement annuel varie entre 1,06 en RCA et 4,57 au Tchad. Alors que les taux d’accroissement sont faibles en République centrafricaine, en Sao Tomé-et-Principe, au Rwanda, au Gabon, en Guinée équatoriale et au Congo, Ils sont plus élevés au Cameroun, au Burundi, en Angola, en République Démocratique du Congo et au Tchad (cf. Tableau 1). D’après la division de population des Nations Unies, la population globale « prévue » pour 2050 serait de 459 millions pour la sous-région selon le scénario le plus probable.
Source : (1) Division de la population des Nations unies. World Population Prospects : 2022 Revision ; (2) Bases de données statistiques et publications des offices statistiques nationaux ; (3) Eurostat : Statistiques démographiques ; (4) Division des statistiques des Nations unies. Rapport sur la population et les statistiques de l'état civil (diverses années).
L’indice de développement humain (IDH), qui intègre des indicateurs de santé, d’espérance-vie, d’éducation et de niveau de vie, situe six pays de la sous-région parmi les pays à niveau moyen en 2022 (Angola, Cameroun, Congo, Gabon, Guinée équatoriale et Sao Tomé-et-Principe) et cinq pays à niveau bas (Burundi, République centrafricaine, République Démocratique du Congo, Rwanda et Tchad). Sur 188 pays évalués dans le monde, les pays de la sous-région sont situés entre la 123ème place (Gabon) et la 191ème place (RCA) par rapport à l’IDH. Sur les 3 dernières décennies, malgré quelques périodes de baisse ou stagnation l’ensemble des pays de la sous-région ont connu une progression globale. C’est au Rwanda que l’IDH a le plus fortement progressé.
Le PIB par habitant varie de 950 USD (au Burundi) à 21 946 USD (au Gabon). Il est inférieur à 1 000 USD au Burundi et supérieur à 10 000 USD au Gabon et en Guinée-Equatoriale. La disparité entre pays de la sous-région est donc grande et repose, entre autres, sur la présence ou l’absence de ressources minières ou pétrolières. Le niveau d’alphabétisation varie beaucoup d’un pays à l’autre et la disparité hommes/femmes reste généralement importante, bien qu’elle se réduise progressivement.
Source : Base de données du programme international de comparaison de la Banque mondiale.
Tableau 1. Démographie et PIB des pays du bassin du Congo
Pays | Superficie (km2) | Population (2023) | Accroissement (2023) | Population (2050) | PIB / habitant en 2023 |
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1 246 700 | 36 684 202 | 3, 081 | 74 295 394 | 8 040, 544 | |
27 830 | 13 238 559 | 2, 728 | 24 131 720 | 950, 880 | |
475 440 | 28 647 293 | 2, 642 | 51 096 317 | 5380, 159 | |
267 670 | 2 436 566 | 2, 199 | 4 084 533 | 21 946, 991 | |
28 050 | 1 714 671 | 2, 411 | 3 143 728 | 18 723,647 | |
622 980 | 5 742 315 | 1, 061 | 10 616 752 | 1 129,980 | |
342 000 | 6 106 869 | 2, 419 | 11 006 472 | 6 932, 938 | |
2 344 860 | 102 262 808 | 3, 260 | 218 246 072 | 1 670,847 | |
26 340 | 14 094 683 | 21 198 | 22 707 910 | 3 361,106 | |
960 | 231 856 | 1, 998 | 365 115 | 6 063,645 | |
1 284 000 | 18 278 568 | 4, 574 | 38 857 686 | 1 969, 303 |
Source : (1) Division de la population des Nations unies. World Population Prospects : 2022 Revision ; (2) Bases de données statistiques et publications des offices statistiques nationaux ; (3) Eurostat : Statistiques démographiques ; (4) Division des statistiques des Nations unies. Rapport sur la population et les statistiques de l'état civil (diverses années).
En Afrique centrale forestière, les populations rurales représentent entre 13 % et 60 % de la population totale des États, avec des regroupements marqués le long des routes et des cours d’eau. Au Gabon et en République du Congo, ce phénomène a été initié dès les années 1930 par l’administration coloniale française, puis prolongé par les gouvernements post-indépendance jusqu’aux années 1970. En revanche, en République Démocratique du Congo (RDC), ce regroupement s’est formé plus spontanément autour des voies de communication. Cependant, l’insécurité croissante a conduit de nombreuses populations à se retirer en forêt pour échapper aux bandes armées.
Cette concentration des populations le long des axes de communication a un impact environnemental direct, entraînant la déforestation et la dégradation des forêts dans une bande de 5 à 20 km autour des routes et rivières, un phénomène clairement visible sur les images satellites. À l’inverse, cela réduit la pression sur les forêts plus éloignées, notamment au Gabon. En RDC et, dans une moindre mesure, au Cameroun, des chasseurs continuent d’établir des camps temporaires dans des zones forestières reculées, prolongeant ainsi l’impact humain au-delà des villages.
À l’opposé, au Rwanda et au Burundi, les populations rurales sont largement dispersées, bien que des tentatives de regroupement aient été observées. Au Rwanda, des initiatives localisées avant 1960, suivies d’efforts de fixation post-génocide en 1994, notamment dans la région du Mutara, ont marqué la dynamique démographique.
Ces particularités régionales illustrent l’interaction complexe entre les dynamiques humaines et l’environnement forestier en Afrique centrale.
Le taux élevé d’urbanisation en Afrique centrale a non seulement réduit la densité des populations rurales, mais a également donné naissance à de grandes villes situées dans ou à proximité des zones forestières. Des métropoles comme Douala, Yaoundé, Libreville, Pointe-Noire, Brazzaville, Kinshasa, Mbuji-Mayi, Tshikapa, Kisangani, et Bukavu exercent une pression variable sur les écosystèmes forestiers en fonction de facteurs culturels et socio-économiques.
La consommation de bois de feu, principalement sous forme de charbon, est une source majeure de déforestation rapide dans un large périmètre autour des grandes agglomérations. Ce phénomène est particulièrement marqué à Kinshasa, Mbuji-Mayi, et Brazzaville, tandis qu’au Cameroun, l’impact s’étend à la lisière nord des massifs forestiers, exacerbée par l’exportation de charbon de bois vers le Nigeria et le Tchad, dans un commerce informel échappant à toute régulation.
Le commerce de la viande de brousse constitue une autre pression significative. Son intensité dépend des infrastructures de transport, telles que les chemins de fer au Cameroun et au Gabon, les routes au Congo et en Centrafrique, et les cours d’eau en RDC. Dans cette dernière, de grandes quantités de viande de brousse sont transportées à vélo depuis le centre du pays vers les villes situées au sud des massifs forestiers (Etat des forêts, 2006).
Les villes du Nord-Cameroun, du Rwanda, et du Burundi ont, en revanche, un impact moindre sur les écosystèmes forestiers. Cependant, les grandes villes affectent les écosystèmes naturels par leurs pollutions. Par exemple, Brazzaville et Kinshasa polluent fortement le fleuve Congo, avec des déchets retrouvés jusqu’aux plages du Gabon. Les villes côtières comme Douala, Libreville, et Pointe-Noire contribuent également à la dégradation des écosystèmes marins et estuariens.
De manière générale, l’Afrique centrale est occupée par des populations humaines bien avant l’avènement de l’homme moderne Homo sapiens. Les plus anciennes traces humaines, comme les outils en pierre taillée découverts au Gabon, remontent à 400 000 ans. Cette région a connu des changements environnementaux majeurs, notamment des phases de fragmentation des forêts, qui ont influencé l’occupation humaine.
Les Pygmées, adaptant leur mode de vie à la forêt, figurent parmi les premiers habitants des massifs forestiers, avec une présence estimée à environ 25 000 ans. Les migrations bantoues, amorcées il y a environ 5 000 ans depuis les confins du Nigeria et du Cameroun, ont permis à ces populations d’occuper une grande partie de l’Afrique subsaharienne. Les Bantous occidentaux ont progressé vers les massifs forestiers, tandis que les orientaux se sont dirigés vers les Grands Lacs. Ces déplacements, liés à des facteurs environnementaux comme la désertification du Sahara, ont favorisé des échanges culturels avec d’autres groupes, notamment les Pygmées et les Oubanguiens.
Les relations entre Pygmées et Bantous ont souvent été marquées par des collaborations et des échanges. Les Pygmées, bien que minoritaires, ont influencé les traditions bantoues à travers des pratiques culturelles partagées. Aujourd’hui, beaucoup de Pygmées vivent en interaction étroite avec les Bantous, avec des niveaux d’assimilation variés, tandis que certains groupes conservent des modes de vie semi-nomades dans des zones isolées.
Les populations forestières d’Afrique centrale forment un ensemble complexe aux origines multiples. Si le terme « peuples indigènes » est utilisé, il devrait inclure aussi bien les Pygmées que les Bantous, tous profondément enracinés dans ces forêts. Cette complexité culturelle reflète une longue histoire d’échanges, d’adaptations et d’interconnexions entre les groupes humains de la région.
En Afrique centrale forestière, l’agriculture itinérante sur brûlis domine, avec des périodes de jachère de plus en plus courtes. La chasse et la pêche restent les principales sources de protéines animales, l’élevage étant limité. Cependant, la chasse s’est fortement commercialisée ces dernières décennies, alimentant les zones urbaines et menaçant la biodiversité faunique et floristique. L’amélioration des infrastructures et l’exploitation industrielle des forêts ont aggravé cette pression, entraînant une raréfaction de la faune et, parfois, une dépendance accrue aux produits forestiers non ligneux, comme le Gnetum, soumis à une surexploitation locale.
Dans les régions d’altitude, comme le rift Albertin et l’ouest du Cameroun, l’agriculture intensive supplante la forêt, favorisée par la fertilité des sols volcaniques. Cette pratique, combinée à l’élevage transhumant, limite la régénération forestière, entraînant une forte déforestation, comme au Rwanda, où les forêts naturelles ne représentent plus que 5-6 % de leur couvert originel. Dans ces zones, l’utilisation des ressources forestières spontanées reste marginale, mais certaines formes de protection traditionnelle subsistent, préservant des îlots de forêt qui abritent encore une biodiversité significative.
Les cours d’eau de la cuvette congolaise, notamment le fleuve Congo, ont longtemps été les principales voies de communication, jouant un rôle central en RDC. Cependant, l’enclavement de l’Afrique centrale, dû à des rapides infranchissables près des côtes, a poussé les colonisateurs à construire des chemins de fer dès la fin du XIXᵉ siècle, comme les lignes Brazzaville-Pointe Noire et Kinshasa-Matadi. Si le réseau routier s’est développé au XXᵉ siècle, son état reste inégal, notamment en RDC, où la dégradation des infrastructures rend certaines régions accessibles uniquement par voie aérienne. Ces voies de communication, essentielles au développement économique, influencent aussi les massifs forestiers, facilitant les exploitations légales et illégales tout en contribuant à fragmenter les forêts.
Les routes et cours d’eau favorisent également l’agriculture en facilitant l’évacuation des produits et en regroupant les populations le long de ces axes, une politique souvent initiée par les administrations coloniales et poursuivie après l’indépendance. Ce regroupement a des effets ambivalents : il fragmente les forêts proches des routes tout en laissant des massifs plus intacts au-delà de 15 à 20 km. Néanmoins, ces zones éloignées ne sont pas à l’abri de la chasse, car les chasseurs, en quête de subsistance, parcourent parfois plus de 300 km, comme en RDC, où les villes minières du Kasaï sont approvisionnées en viande de brousse depuis le parc national de la Salonga.